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" La folie du moment est darriver à lunité des peuples et de ne faire quun seul homme de lespèce entière, soit; mais en acquérant des facultés générales, toute une série de sentiments privés ne périra-t-elle pas? Adieu les douceurs du foyer; adieu les charmes de la famille; parmi tous ces êtres blancs, jaunes, noirs, réputés vos compatriotes, vous ne pourries vous jeter au cou dun frère "
François-René de Chateaubriand, Mémoires d'outre-tombe, Pléiade, p. 923
Beaucoup d'éléments de ce chapitre figurent dans deux papiers publiés en 1998 et 1999 que j'ai actualisés.
- Alan Sokal et Jan Bricmont " Impostures intellectuelles ", 1997, Odile Jacob., voir dossier
- Sebastian Roché " Sociologie politique de linsécurité " PUF 1997, p. 49
- Leo Strauss " Histoire de la philosophie politique ", p. 277
- Un auteur essentiel et négligé: Louis Dumont
- " Pour les anciens à lexception des stoïciens- lhomme est un être social, la nature est un ordre, et ce quon peut apercevoir, au delà des conventions de chaque polis particulière, comme constituant la base idéale ou naturelle du droit, est un ordre social en conformité avec lordre de la nature (et par suite avec les qualités inhérentes aux hommes). Pour les modernes, sous linfluence de lindividualisme chrétien et stoïcien, ce quon appelle le Droit naturel (par opposition au droit positif) ne traite pas dêtres sociaux mais dindividus, cest-à-dire dhommes dont chacun se suffit à lui-même en tant que fait à limage de Dieu et en tant que dépositaire de la raison " Louis Dumont " Essais sur lindividualisme ", Points Seuil, 1983
- La " volonté générale ", ou lintérêt général, nest pas chez Rousseau, le résultat du contrat social et lexpression de la démocratie, qui pourrait alors se réduire à la " tyrannie du plus grand nombre " où le peuple aurait tous les droits. Cest une propriété émergente qui préexiste au vote majoritaire. Il y a identité entre la volonté générale, légitimité et bien commun., ainsi que le résumait Durkheim " Si la communauté veut être obéie, ce nest pas parce quelle commande, mais parce quelle commande le bien commun En dautres termes, la volonté générale nest pas constituée par létat dans lequel se trouve la conscience collective au moment où se prend la résolution : ce nest que la partie la plus superficielle du phénomène Ce sont les murs qui font la véritable constitution des Etats. La volonté générale est donc une orientation fixe et constante des esprits et des activités dans un sens déterminé, dans le sens de lintérêt général. Cest une disposition chronique des sujets individuels ". Cité par Louis Dumont, op. cit, p. 117.
Allan Bloom " Lâme désarmée " Julliard 1987, et Guérin Littérature, Montréal, traduction de "The closing of american mind") Le livre semble épuisé en français mais est disponible en anglais. (les critiques des lecteurs sur le serveur d'amazon.uk donne une idée de la passion suscitée par le livre...).
Allan Bloom a été attaqué par la gauche dans son combat contre le relativisme et classé parmi les "élististes". Il est heureusement réhabilité par Christopher Lasch - qui fut longtemps une des références du marxisme américain, mais est en fait inclassable - dans son ouvrage posthume "La révolte des élites et la trahison de la démocratie" traduit en français aux Editions Climats, et dont l'introduction de Jean-Claude Michéa donne la quintessence
" Telle est bien, en définitive, laliénation spécifique dans laquelle se débat de nos jours lindividu libéral-libertaire, prototype humain désormais fabriqué en série, dont la gauche na pas le monopole, bien quelle constitue à lévidence son refuge de prédilection. Cet individu, en effet, doit simaginer en permanence quil est dans la marge afin de pouvoir continuer à se tenir dans la norme ; il lui faut croire à tout instant quil vit dans la transgression, le libertinage et la volupté épicurienne modes de vie bien évidemment au-dessus de ses pauvres moyens pour demeurer le pantin pathétique qui sagite désespérément dans lunivers ennuyeux, tyrannique et puritain de la consommation obligatoire et de ses changements incessants. On pourrait presque dire, en employant lancien langage, quil doit sépuiser à être « de gauche » pour que le monde continue à être « de droite »
Karl Popper , " The abdication of philosophy: Philosophy and the public good ", repris dans le recueil " The myth of the framework, in defence of science and rationality ", Routledge, 1994
Cette possibilité de combler les écarts entre les cadres de référence reste soumise à l'intérêt et à la volonté humaine, mais existe fondamentalement
- "Thus my thesis is not that the gulf between different frameworks, or between different cultures, can, for logical reasons, always be bridged. My thesis is merely that it can usually be bridged. There may be no common assumptions. There may perhaps be only common problems. For different groups of humans do, as a rule, have much in common, such as the problem of survival. But even common problems may not be needed. My thesis is that logic never underpins the myth of the framework nor its denial. But we can try to learn from each other. Wether we succeed will depend largely on our goodwill ( )." "The myth of the framework", p. 38
- "We thus can logically distinguish between a mistaken method of criticizing and a correct method of criticizing. The mistaken method starts from the question: How can we establish or justify our thesis ( ) by contrast, the correct method of critical discussion strarts from the question: What are the consequences of our thesis or our theory? Are they acceptable to us?" Popper; op. cit. P.60
Nietzsche " Fragments posthumes " 11 (118), cité dans Paul Valadier " Lanarchie des valeurs "
J'ai publié plusieurs choses sur la décision publique ces dernières années que l'on trouvera dans les pages consacrées à mes publications académiques
"Le management public comme science morale": un programme de recherche que j'ai présenté pour ma HDR en sciences de gestion, et que j'ai décliné dans plusieurs articles. Téléchargeable sur le site du CNRS
J'ai publié "Nouveaux enjeux et processus de la décision publique" (septembre 2001) " Essence of decision, explaining the cuban missile crisis "; Graham Allison, Harper&Collins, 1971. Une note de lecture Voir "Symbiotic intelligence: self-organizing knowledge on distributed networks driven by human interaction", article rédigé par cinq chercheurs du Santa Fé Institute et du laboratoire National de Los Alamos. http://www.santafe.edu/sfi/publications/98wplist.html WP 98-05-039 " Collective choice and mutual knowledge structure", http://www.santafe.edu/sfi/publications/Working-Papers/ Voir le papier n° 98-04-032. La page du Symbiotic Intelligence project au Laboratoire National de Los Alamos, la référence en matière de pilotage des systèmes bâtis par des agents intelligents. Claude Rochet " le diagramme daffinité ", un outil pour conduire un processus de construction d'un intelligence collective autour de la résolution d'un problème: http://perso.wanadoo.fr/kj/KJ.html
Un auteur essentiel vient d'être traduit en français (je n'ai lu son livre qu'après avoir terminé mon manuscrit) Quentin Skinner "Les fondements de la pensée politique moderne" qui apporte une mise en perspective indispensable, notamment par sa lecture de Machiavel. Skinner étudie le développement de la pensée républicaine fondée sur le bien commun depuis Thomas d'Aquin (XIII° siècle) jusqu'à la réforme protestante, confrontée à la nécessité de justifier la rébellion contre l'ordre établi au nom de la liberté de conscience. Au XVI° siècle tous les fondamentaux de la pensée républicaine sont posés: primauté du bien commun comme critère de légitimité du pouvoir, laïcité en séparant clairement l'humanisme chrétien de la domination temporelle de la papauté et liberté individuelle. Pour Skinner la liberté se définie essentiellement comme "ne pas être empeché de faire". Le républicanisme est donc une pensé d'une étonnante actualité, étouffée par l'opposition entre libéralisme et marxisme qui a accaparé le débat public et dont la revue québecoise de sciences politique présente un panorama "enjeux contemprorains du républicanisme"
On fait dire beaucoup de bétises à Adam Smith, tant à gauche qu'à droite. Des auteurs de qualité comme Louis Dumont ou Michel Beaud valident les interprétations fantaisistes données par l'école néoclassique selon laquelle l'égoïsme serait le seul moteur possible de l'activité humaine et le plus efficace pour organiser la société.
Un auteur que Amartya Sen a contribué à faire (re)lire à propos de l'évaluation des choix publics.
Essentiel pour comprendre la pensée de Smith, la thèse de Michaël Biziou "Adam Smith et l'origine du libéralisme"
En fait, dans ces deux mentions de la « main invisible » (une dans la Théorie et une dans l'Enquête) qui font encore couler tant d'encre, Smith reprend à son compte une thèse utilitariste développée par Pufendorf que rappelle Michaël Biziou « les hommes réprouvent l'injustice non seulement parce que leurs sentiments moraux les y poussent, mais encore parce que leur esprit de système leur fait aimer la beauté du système social » (Biziou, 2003). S'inscrivant dans un système de droit naturel, Smith évoque par la parabole de la « main invisible » les effets non intentionnels inspirés de la volonté de Dieu des actions individuelles intentionnelles. Smith s'inscrit dans la culture de la machine sociale comme système global dont l'harmonie découle des principes du droit naturel, et qui fait obligation au souverain, qui n'est, dans la théorie scolastique, dépositaire de la souveraineté que parce qu'au service du bien commun , de « perfectionner intentionnellement l'ordre sub-optimal et non intentionnel de la société » (Biziou, 2003 p. 253).
Le processus « naturel » de sélection dépend donc, en fin de compte, lui aussi des contraintes informelles de la société, représentées ici par les valeurs morales.