Il arrive un moment où la question n'est plus de continuer à accumuler
de nouvelles connaissances, de nouveaux discours, d'autres théories
encore; tout à coup il s'agit de trouver, avec sa passion, son
désir, son instinct, un point fixe d'où l'on puisse maîtriser
les choses. La question n'est plus de l'origine des choses et
de leur fonctionnement; la question urgente devient soudain celle
du sens de ces données (...)
On fait alors l'expérience que ce point vers lequel tout converge,
ce centre de la signification de toute chose accessible à la connaissance,
ce n'est pas par un effort d'énergie qu'on y accède, au contraire:
toute attitude active d'acquisition de connaissances doit céder
le pas à une paisible attitude de contemplation, d'écoute, de
vision, de descente en soi.
Cette seule chose essentielle, on ne peut pas la forcer, c'est
une rencontre, quelque chose qu'on trouve sans le chercher.
Le sens de toute choses, on ne peut l'inventer; la raison dernière
des choses, on ne peut la fonder sur la raison: lorsque l'on rencontre
cet essentiel, on a le sentiment d'une unité dernière, suprême,
le sentiment (...) d'avoir trouvé ses repères, son équilibre intérieur,
où tout questionnement est désormais inutile.
L'unique chose qui soit essentielle est enfin trouvée. Et à partir
de cette chose, il est enfin permis de vivre.
Eugen DREWERMANN
Sur l'homme riche